mercredi 9 octobre 2013

Les Renards Pâles de Yannick Haenel chez gallimard

"Il suffit que l'invivable affecte quelques-uns pour que le vivable n'existe plus pour personne."

Ce n'est pas du tout un roman lusophone, mais un énorme coup de cœur littéraire. un bel engagement poétique, notre liberté chaque fois plus restreinte en faveur du contrôle, des êtres humains traités comme de simples déchets, le désœuvrement, le vide "l'intervalle" qui reconstruit, renaitre, rencontrer, s'engager, donner la parole aux sans papiers, aux sans abris, aux sans emploi, enflammer Paris, bruler nos cartes d'identités comme geste universel... un romans humainement très riche, d'un point de vu d'où on a pas l'habitude d'observerr.

Le je se fond dans le nous et disparait au milieu des autres, sous des masques les identités disparaissent dans les flammes aussi et forment un tout. Passer de la bordure, au centre, là ou tout s'embrase et se révolte

Voici plusieurs extraits des renards pâles de Yannick Haenel. Retrouver dans une grande sensibilité poétique, un sentiment politique

« Quelqu’un a sorti ses papiers d'identité et les a jeté dans le feu. le geste c'est répété tout au long de la rue de Rivoli et en quelques minutes tous ceux qui avaient des papiers d'identités les ont fait disparaitre à travers les flammes" "Lorsque plus personne n'à de papiers, est-il encore possible de repérer les sans-papiers ? Voici que nos masques se fondent dans une absence générale de papiers. Voici que cette nuit place de la concorde, les sans-papiers se confondent avec tous ceux qui n'en ont plus. Voici qu'il n'y à plus de sans-papiers, puisque les papiers n'existent plus voici que s'invente à travers les flammes l'utopie d'un monde débarrassé de l'identité "

"Les larmes aussi sont une parole, la plus vivante sans doute, parce qu'elle arrose nos corps asséchés comme si elles leur prodiguaient la fertilité."

"J'étais dans le trou de rat de la République là où la politique consiste à étouffer les cris"

"Selon lui notre époque était celle où la police avait remplacée la politique. Ce remplacement était historique, il signait notre servilité par le mot "police" il n'entendait pas seulement les forces de l'ordre, mais tout ce qui en nous accepte d'être réduit, notre asservissement n'aurait bientôt plus de limite, puisque la parole politique était morte, et que seul le control était en vie. "Nous n'avons plus d’existence politique""

" C’est bien de guerre qu’il s’agit : une guerre civile divise la France, comme tous les pays qui suspendent le droit de certaines personnes en criminalisant leur simple existence. Elle oppose les étrangers « indésirables », comme vous dites, et forces de polices. Le plus souvent elle est dissimulée pour des raisons politiques : ainsi reste-t-elle en partie secrète ; mais il arrive, pour les mêmes raisons, qu’on l’exhibe : elle dégénère en spectacles, et les médias en présentant les sans papiers comme des délinquants qui enfreignent une loi, maquille cette guerre en lutte contre l’insécurité "

"L'existence est quelque chose qui arrive sur vous comme un animal en pleine course, L'existence quand elle vous arrive ne fait pas attention à vous : elle vous précipite avec elle dans son élan, et alors vous vous mettez à vivre"

" Le tumulte à sa façon est un vide ; le néant s'y agite avec ferveur qu'il dérobe aux journée calmes"

" Le seul espoir viendrait de ceux qui se taisent, ceux qui n'ont pas accès à la parole parce qu'ils sont exclus de la parole, les sans abris, les sans emplois, les sans papiers - toute la communauté des SANS . Leur silence est sacré, parce qu'il est ce qui reste. Dans un sacrifice il y a toujours un reste ; et le jour où ceux dont l'existence est récusée par l'économie trouverons une parole, alors la politique existera de nouveau"

"On confond le"temps libre" avec l'oisiveté, mais le temps à toujours été libre : rien n'est plus libre, plus loisible que le temps ; ce sont les humains qui le gâchent, en le remplissant de leur cafouillage, est-il possible d'habiter le vide ?

Y'a bien longtemps que je n'ai eu un aussi gros coup de coeur pour un livre, j'y ai trouvé une dimension humaine et universelle

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