mardi 1 février 2011

Dormir et Dedormir

Durmo e desdurmo. Do outro lado de mim, lá para trás de onde jazo, o silêncio da casa toca no infinito. Oiço cair o tempo, gota a gota, e nenhuma gota que cai se ouve cair. Oprime-me fisicamente o coração físico a memória, reduzida a nada, de tudo quanto foi ou fui. Sinto a cabeça materialmente colocada na almofada em que a tenho fazendo vale. A pele da fronha tem com a minha pele um contacto de gente na sombra. A própria orelha, sobre a qual me encosto, grava-se-me matemáticamente contra o cérebro. Pestanejo de cansaço, e as minhas pestanas fazem um som pequenínissimo, inaudível, na brancura sensível da almofada erguida. Respiro, suspirando, e a minha respiração acontece - não é minha. Sofro sem sentir nem pensar. O relógio da casa, lugar certo lá ao fundo das coisas, soa e meia hora seca e nula. Tudo é tanto, tudo é tão fundo, tudo é tão negro e tão frio! Passo tempos, passo silêncios, mundos sem forma passam por mim. Subitamente, como uma criança do Mistério, um galo canta sem saber da noite. Posso dormir, porque é manhã em mim. E sinto a minha boca sorrir, deslocando levemente as pregas moles da fronha que me prende o rosto. Posso deixar-me à vida, posso dormir, posso ignorar-me... E, através do sono novo que me escurece, ou lembro o galo que cantou, ou é ele, de veras, que canta segunda vez.

Dormir et dédormir
De l'autre côté de moi, bien loin derrière l'endroit où je gis, le silence de la demeure touche à l'infini. J'écoute la chute du temps, goutte à goutte, et aucune des gouttes qui tombent n'est entendue dans sa chute. Je sens mon coeur physique oppressé physiquement par le souvenir, réduit à rien, de tout ce qui a été ou de ce que j'ai été. Je sens ma tête matériellement sur l'oreiller, qu'elle creuse d'un petit vallon. La peau de la taie d'oreiller établit avec ma peau le contact d'un corps dans la pénombre. Mon oreille même, sur laquelle je repose, se grave mathématiquement contre mon cerveau. Mes paupières battent de fatigue, et mes cils produisent un son d'une faiblesse extrême, inaudible, sur la blancheur sensible de l'oreiller relevé. Je respire, tout en soupirant, et ma respiration est quelque chose qui se produit - elle n'est pas moi-même. Je souffre sans penser ni sentir. L'horloge de la maison, endroit fixe au coeur des choses, sonne la demie, sèche et nulle. Tout est si vaste, tout est si profond, tout est si noir et si froid !
Je passe le cours des temps, je passe des silences, des mondes sans forme passent auprès de moi.
Soudain, tel un enfant du Mystère, un coq se met à chanter, ignorant la nuit. Je peux enfin dormir, car c'est le matin au fond de moi. Et je sens ma bouche sourire, déplaçant doucement les plis légers de la taie qui encadre mon visage. Je peux m'abandonner à la vie, je peux dormir, je peux m'ignorer... Et à travers le sommeil tout neuf qui m'obscurcit, ou bien je me souviens du coq qui vient de chanter ou bien c'est lui qui, réellement chante pour la seconde fois... . FERNANDO PESSOA LR LIVRE DE L'INTRANQUILITÉ